Réflexion
sur le NON
Non en France ! Non aux Pays-Bas
! D’autres Non encore à venir si l’on en croit
les sondages. Ce devait être le baptême solennel de
la Constitution européenne. Las, le berceau est noyé
sous les draches nationales.
Pourquoi ? Les raisons sont multiples et, à l’évidence,
différentes d’un pays à l’autre. On peut
toutefois, dès à présent, faire quelques réflexions
utiles pour l’avenir.
Il faut d’abord reconnaître que le texte lui-même
soumis aux électeurs pose problème. Pourquoi, diable,
a-t-il fallu mélanger dans un même texte de près
de 500 pages, des éléments proprement constitutionnels
– les objectifs de l’Union, ses institutions, ses compétences,
les droits des citoyens – et le contenu des politiques européennes
- concurrence, agriculture, … ? Il ne fallait pas tout mettre
sur le même pied. C’est peut-être d’ailleurs
en explorant cette voie qu’on parviendra, in fine, à
sauver le projet.
Il faut reconnaître ensuite que la procédure n’est
pas la bonne. Je n’en démords pas : à une Constitution
européenne doit correspondre un référendum
européen. Nous avions été plusieurs à
le demander, sans être entendus. Je reste pourtant convaincu
que si le projet de Constitution avait été soumis
à un référendum européen organisé
le même jour dans tous les Etats membres, il aurait été
approuvé à une double majorité, dans la population
et dans la plupart des Etats. C’est la voie de l’avenir.
Il faut avoir le courage aussi d’affirmer que l’Europe
ne dispense pas les gouvernements de mener de bonnes politiques.
L’Europe ne fait pas tout et ne doit pas tout faire. Il y
a aujourd’hui des pays qui vont très bien, comme la
Grande-Bretagne ou l’Espagne : croissance économique
solide, baisse du chômage, finances publiques saines. D’autres,
au contraire, comme l’Italie, la France, les Pays-Bas, l’Allemagne
traînent la patte. Ce n’est pas "la faute à
l’Europe", mais celle des gouvernements. L’Europe
n’est pas une potion magique pour les incapables.
Il faut enfin admettre que l’élargissement sans fin,
c’est la fin assurée du rêve européen.
Quand on pense aux dégâts (faux d’ailleurs) provoqués
par le « plombier polonais », on mesure mieux l’erreur
que constitue la perspective de l’entrée de la Turquie
dans l’Union. L’Europe doit devenir une puissance européenne.
Elle n’a pas vocation à être une sorte d’ONU
régionale, hétérogène, empêtrée
à l’intérieur et impuissante à l’extérieur.
Le NON a au moins le mérite de le rappeler.
Gérard Deprez
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