20 questions à Gérard Deprez

1. Est-il facile de participer à un groupe politique qui compte autant de nationalités différentes ?
2. Préférez-vous travailler à Bruxelles ou à Strasbourg ? Pourquoi ?
3. Quel est pour vous l’avenir de l’Union européenne ? Comment celle-ci va-t-elle évoluer ?
4. Pensez-vous que l’Europe doive encore s’agrandir ?
5. Quelles limites doit-on mettre à l’élargissement de l’Europe ?
6. Quelle(s) matière(s) vous attire(ent) le plus dans les compétences européennes ?
7. Pourrait-on voir naître un conflit armé à l’intérieur de l’Union européenne ?
8. Pensez-vous que l’Europe aie la volonté et/ou le devoir de défendre les Droits de l’Homme à travers le monde ?
9. Pensez-vous que tous les pays européens devraient utiliser l’euro ? L’exclusion volontaire de certains pays de la zone euro pourrait-elle être dommageable pour l’économie européenne ?
10. Certains pays membres sont –ils un frein à l’évolution de l’Europe ?
11. Comment rendre l’Europe plus proche des jeunes ?
12. Qu’est-ce qui devrait être modifié pour que la Constitution européenne puisse être signée, le texte ou son emballage politique ?
13. Quel fut votre parcours avant d’être élu député européen ?
14. Qu’est-ce que l’Europe peut améliorer dans le quotidien des Européens ?
15. Pensez-vous que certaines matières doivent rester de la compétence propre des Etats ?
16. Quel est le plus gros avantage que la Belgique ait à faire partie de l’Europe ?
17. Comment la cour des comptes gère-t-elle les fonds européens ? Ne pensez-vous pas qu’il y ait une discrimination dans la répartition des fonds entre les pays plus riches et les plus pauvres ?
18. Quelles festivités voudriez-vous voir se réaliser lors de la Journée de l’Europe ?
19. citez 2 personnalités les plus emblématiques de l’Europe ? En quoi ces personnes sont-elles remarquables ?
20. De quoi rêvez-vous pour l’Europe ?

 

 

1.
Est-il facile de participer à un groupe politique qui compte autant de nationalités différentes ?

Contrairement à ce que l'ont pourrait penser, cela ne pose pas de problème particulier. Pour deux raisons essentielles. D'abord parce que le Parlement européen est très bien organisé: pour toutes les réunions officielles, la traduction simultanée est organisée dans toutes les langues reconnues (séances plénières, réunions de commission, réunions de groupe, réunion de groupe de travail...) et les documents sont disponibles dans toutes les langues. Ensuite, parce que pour les réunions informelles, spécialement depuis le dernier élargissement, la langue de travail "officieuse" est devenue l'anglais. Il suffit donc de se mettre à l'anglais pour se sentir à l'aise à peu près partout. Enfin je dois signaler qu'à l'exception de quelques-uns, la plupart des parlementaires du groupe ADLE (Alliance des Démocrates et Libéraux pour L'Europe) sont capables de s'exprimer dans plusieurs langues, y compris en français.

2.
Préférez-vous travailler à Bruxelles ou à Strasbourg ? Pourquoi ?

En tant que belge, il est évident que je préfère travailler à Bruxelles: les déplacements prennent beaucoup moins de temps, je peux continuer à mener une vie "normale" en rentrant chez moi tous les soirs. En outre, comme les autres institutions (Conseil, Commission) ont leur siège officiel à Bruxelles, le fait d'y travailler facilite beaucoup les contacts. Enfin, les contacts avec les média - et les groupes de pression! - sont faciles à organiser du fait que la plupart d'entre eux sont localisés à Bruxelles.

Cela dit, un séjour à Strasbourg, une semaine par mois, n'a rien d'une punition: la ville est très agréable et les conditions de travail pour les parlementaires ne sont pas mauvaises, surtout depuis le développement de l'internet.

3.
Quel est pour vous l’avenir de l’Union européenne ? Comment celle-ci va-t-elle évoluer ?

A titre personnel je sais très bien ce que je souhaite que l'Union européenne devienne à l'avenir: je suis un partisan convaincu d'une Europe politique, organisée sur le mode fédéral, dont l'ambition doit être de devenir un acteur politique mondial puissant et respecté. Y parviendrons-nous? Personne ne peut répondre aujourd'hui avec certitude à cette question: si le pire n'est pas sûr, le meilleur n'est pas garanti. La seule chose dont je suis absolument sûr, c'est que l'avenir de l'Europe est dans les mains des citoyens européens. S'ils décident de vouloir une Europe politique et s'ils soutiennent les responsables politiques qui y travaillent, alors l'Europe politique deviendra une réalité. Si par contre, ils se laissent aller au désintérêt, au désenchantement ou pire, au nationalisme, l'Europe cessera d'être un grand projet et s'enlisera dans les marchandages et l'impuissance. De la même manière qu'il n'y a pas de nation sans peuple qui se reconnaît en elle, il n'y aura pas d'Europe si les citoyens des Etats membres ne donnent pas une vraie dimension européenne à leur citoyenneté.

4.
Pensez-vous que l’Europe doive encore s’agrandir ?

La question de l'élargissement futur est, pour une part, déjà tranchée: prochainement (en principe en janvier 2007), la Roumanie et la Bulgarie deviendront membres de l'Union européenne. Les négociations d'adhésion sont terminées et seule la date effective de celle-ci reste formellement à confirmer. Dans une seconde étape, je vois se profiler un élargissement aux pays des Balkans: les négociations ont commencé avec la Croatie; la République de Macédoine a posé officiellement sa candidature; dès lors qu'elles seront démocratisées et stabilisées, la Serbie-Monténégro et la Bosnie- Herzégovine ne manqueront pas de frapper à la porte de l'Union. Au-delà, les choses me semblent beaucoup moins claires. Les négociations d'adhésion ont certes débuté avec la Turquie mais chacun s'accorde à reconnaître qu'elles seront longues et difficiles. De plus, s'il se confirme que cette adhésion devra être ratifiée par referendum dans certains pays (dont la France), le résultat final est loin d'être acquis si l'on se base sur les résultats actuels des sondages d'opinion qui font tous apparaître les profondes réticences sinon, le refus, de l'opinion publique.
La question se pose par ailleurs de savoir quelle réponse nous donnerons demain à d'autres pays qui ont, comme l'Ukraine, déjà fait part de leur souhait d'adhérer ou qui, comme la Biélorussie, pourraient le faire une fois libérées du joug stalinien qui rechigne à laisser la place. En résumé, et pour préciser ma position personnelle, je dirais ceci: "oui" à la Roumanie et à la Bulgarie, "oui", sans aller trop vite, aux républiques issues de la dissolution de l'ex-Yougoslavie. Au-delà, plutôt que de parler d'adhésion, je pense que nous aurions intérêt à développer un nouveau concept, soit "politique de voisinage", soit "politique d'association" ou de "partenariat", pour organiser nos relations avec certains pays, tels la Turquie ou l'Ukraine, tant leur adhésion risquerait de porter un coup fatal à l'équilibre général de toute la construction européenne.

5.
Quelles limites doit-on mettre à l’élargissement de l’Europe ?

En principe, les limites de l'Union européenne ne peuvent pas être fixées a priori. A partir de ce qui était inscrit dans le projet de Traité constitutionnel: "l'Union européenne est ouverte à tous les Etats européens qui respectent ses valeurs et qui s'engagent à les promouvoir en commun", nous disposons certes d'une frontière maximale "virtuelle" (tous les Etats européens) mais la frontière réelle reste fluctuante (les Etats candidats doivent s'engager)! A quoi, il convient d'ajouter deux éléments supplémentaires qui accroissent l'incertitude. Remarquons d'abord, comme l'illustre le cas de la Turquie, que le concept d'Etat européen peut être défini de manière très extensive! Qu'en serait-il, dans le même ordre d'idée, de la Russie? Remarquons ensuite que depuis les sommets européens de Copenhague et d'Helsinki qui ont explicité les critères auxquels les Etats doivent satisfaire pour pouvoir adhérer, il y a un critère qui peut être décisif mais dont l'importance n'a d'égale que l'imprécision: il s'agit de la "capacité d'absorption" de l'Union européenne. Celle-ci, avant d'accepter un nouvel adhérent, doit apprécier si elle est en mesure de l'absorber tout "en maintenant la dynamique de l'intégration européenne"! On le voit, à la lecture de ces quelques éléments, les frontières de l'Union sont à la fois mobiles et incertaines. A mes yeux, la chose n'est pas essentielle: ce ne sont pas les frontières qu'il faut figer, c'est la méthode pour les fixer qui doit être établie. Je ne vois personnellement qu'un seul moyen indiscutable démocratiquement pour le faire: un referendum européen. Entrera dans l'Union, à l'avenir, tout pays "européen" dont l'adhésion aura été approuvée par une majorité de citoyens représentant une majorité d'Etats membres de l'Union.

6.
Quelle(s) matière(s) vous attire(ent) le plus dans les compétences européennes ?

Personnellement, je suis membre de la commission des Budgets et membre suppléant de la commission des Libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures. Dans ces deux commissions, je m'intéresse plus particulièrement aux dossiers relatifs à la politique d'immigration et d'asile, au contrôle des frontières extérieures, à la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée.

7.
Pourrait-on voir naître un conflit armé à l’intérieur de l’Union européenne ?

L'Union européenne a été créée pour mettre fin aux guerres fratricides que se sont livrées les Etats européens tout au cours de leur histoire et en particulier durant le vingtième siècle. En rêvant d'un "patriotisme" européen commun, les pères fondateurs ont voulu éradiquer sur notre continent les nationalismes guerriers et leurs cortèges d'atrocités. Je considère, cela étant, que le risque d'un conflit armé entre des pays membres de l'Union européenne est pratiquement égal à zéro. Certes, des escarmouches peuvent toujours survenir dans des zones frontalières (îles de la mer Egée, Balkans), mais elles seraient vite contrôlées. Par contre, il n'est pas impossible qu'apparaissent à l'avenir, surtout dans les Balkans, des mouvements nationalistes violents, à l'instar de ce que l'on a connu avec l'ETA au Pays-Basque ou l'IRA en Irlande du Nord. Par ailleurs, les Etats voisins de l'Union à l'Est (notamment l'Ukraine, la Moldavie, la Biélorussie) pourraient être fortement déstabilisés en cas de fortes tensions entre l'Union et la Russie.

8.
Pensez-vous que l’Europe aie la volonté et/ou le devoir de défendre les Droits de l’Homme à travers le monde ?

L'Europe a effectivement vocation à défendre et à promouvoir le respect des droits de l'Homme partout dans le monde. Elle doit, pour cela, être irréprochable en son propre sein. Il faut saluer à cet égard la création prochaine à Vienne de l'Agence européenne pour les droits fondamentaux. A l'extérieur, elle doit amplifier ses efforts notamment en systématisant les clauses suspensives dans tous les Traités qu'elle signe avec des Etats tiers.

9.
Pensez-vous que tous les pays européens devraient utiliser l’euro ? L’exclusion volontaire de certains pays de la zone euro pourrait-elle être dommageable pour l’économie européenne ?

A terme, je considère comme souhaitable et même nécessaire que tous les Etats de l'Union utilisent la même monnaie. Cela dit, il faut procéder avec méthode et avec prudence. Pour participer à la monnaie unique, les pays doivent respecter les critères qui ont été fixés: il ne serait de l'intérêt de personne d'affaiblir l'Euro ou de causer des dommages à des économies mal préparées. Par ailleurs, il faudrait aussi que les actuels pays membres de la zone euro améliorent leur performance: la croissance de la zone euro est aujourd'hui trop lente, le chômage trop élevé, les déficits publics trop fréquents.

10.
Certains pays membres sont–ils un frein à l’évolution de l’Europe ?

Il est de bon ton, en Europe comme ailleurs, quand les choses ne vont pas assez vite ou que les résultats ne sont pas assez bons, de désigner des boucs-émissaires. La réalité est plus complexe. L'Union est traversée par des courants qui ne sont pas tous convergents. Ainsi, les pays neutres de même que les pays les plus atlantistes freinent la création d'une véritable Europe de la Défense; certains pays, comme la France, ralentissent les nécessaires réaffections du budget européen en sacralisant les dépenses agricoles; d'autres pays font obstacle à la réalisation d'une véritable intégration des politiques policières et pénales; d'autres encore, comme la Belgique, freinent la réalisation de la liberté de circulation des travailleurs en n'ouvrant pas leurs frontières aux travailleurs des dix nouveaux pays. Et ainsi de suite...

11.
Comment rendre l’Europe plus proche des jeunes ?

Il y a beaucoup de profils différents dans la jeunesse. Certains sont très engagés dans la construction européenne et sont très bien informés. D'autres sont moins directement concernés tout en étant plutôt favorables. D'autres encore sont hostiles au type d'Europe qui se construit, souvent d'ailleurs pour des raisons très idéologiques. D'autres enfin, sont indifférents à l'Europe, de la même manière qu'ils sont indifférents à la politique en général. Il n'y a donc pas de solution unique.

Au risque donc de schématiser, je crois que l'Europe pourrait être beaucoup plus populaire auprès des jeunes en général si trois choses étaient faites:

1. un grand programme européen, à mettre en œuvre dans et par chaque Etat membre, pour stimuler l'emploi des jeunes et les faire échapper à la précarité;
2. un grand programme européen (un super Erasmus) donnant le droit à chaque jeune européen d'aller se former ou travailler dans un autre pays pendant six mois ou un an;
3 l'organisation dans chaque pays de l'Union d'écoles bilingues (ex: français/anglais, anglais/allemand) donnant aux jeunes une parfaite maîtrise linguistique et culturelle dans des univers différents.

12.
Qu’est-ce qui devrait être modifié pour que la Constitution européenne puisse être signée, le texte ou son emballage politique ?

A mon avis, le problème n'est pas dans le texte. Dans les deux pays où le résultat a été négatif (deux pays fondateurs!), le poids du contexte politique national a été déterminant. La France a sanctionné J. Chirac, elle a eu peur du plombier polonais, de la Turquie et du soi-disant ultralibéralisme européen. La Hollande a exprimé son désarroi face aux échecs de l'intégration des immigrés, elle a refusé d'être le plus gros contribuable par tête au budget européen. Pour sortir de l'impasse, je vois deux nécessités complémentaires: une de fond, une de méthode.
Sur le fond, il est impérieux de vaincre la peur qui est infiltrée dans la tête des citoyens des pays fondateurs. Le remède se trouve dans la croissance économique et la création d'emplois. Quand à la méthode, je plaide pour que la Constitution européenne soit ratifiée par un referendum européen: dès lors qu'elle aurait été approuvée par une majorité de citoyens européens, représentant une majorité d'Etats membres, elle serait d'application dans toute l'Union. Les pays qui ne seraient pas d'accord pourraient se retirer.

13.
Quel fut votre parcours avant d’être élu député européen ?

Ma carrière professionnelle a connu quatre étapes sensiblement différentes l'une de l'autre. Après ma licence en sociologie à l'U.C.L., j'ai été assistant au Centre de Recherches sociologiques pendant 7 ans (1967-1974), période qui s'est terminée par une thèse de doctorat. Pendant les sept années suivantes, j'ai travaillé dans plusieurs cabinets ministériels, dans l'état-major du P.S.C.-C.V.P., avant devenir chef de cabinet. En 1981, je suis devenu président du P.S.C., fonction que j'ai exercée pendant près de quinze ans. En 1997-98, j'ai connu un grave différend avec mon parti dont j'ai été exclu. J'ai alors fondé le M.C.C. et rejoint la fédération P.R.L.-F.D.F.-M.C.C., devenue depuis le M.R. Je suis membre du Parlement européen depuis 1984.

14.
Qu’est-ce que l’Europe peut améliorer dans le quotidien des Européens ?

L'Europe intervient tellement pour améliorer le quotidien des européens qu'il faudrait un ouvrage entier pour en faire l'inventaire. Si votre voiture pollue moins, c'est grâce à l'Union. Au supermarché, la liste des ingrédients qui figurent sur l'étiquette, c'est l'Union, de même que la traçabilité de la viande. Les substances interdites dans les jouets pour enfants, c'est toujours l'Union, de même que les normes pour les eaux de baignade. La possibilité quotidienne de franchir les frontières sans contrôle, c'est encore l'Union...

15.
Pensez-vous que certaines matières doivent rester de la compétence propre des Etats ?

L'Europe n'a évidemment pas vocation à s'occuper de tout. Le projet de Constitution européenne l'avait très clairement prévu en distinguant trois types de compétences: les compétences exclusives de l'Union, les compétences partagées (entre l'Union et les Etats membres), les "compétences" d'appui, qui interviennent en support de l'action des Etats membres.
Parmi les compétences partagées, il faut mentionner notamment la politique sociale, l'environnement, la protection des consommateurs, les transports, les réseaux transeuropéens, l'énergie, l'espace de liberté, de sécurité de justice...
Parmi les compétences d'appui - c'est-à-dire celles où la responsabilité appartient essentiellement aux Etats membres, il faut citer la santé, l'industrie, la culture, le terrorisme, l'éducation, la jeunesse, les sports, la formation professionnelle, la protection civile...
Par ailleurs, les Etats membres détiennent une responsabilité exclusive en ce qui concerne l'armée et la défense nationale, la police et le maintien de l'ordre, l'organisation judiciaire...

16.
Quel est le plus gros avantage que la Belgique ait à faire partie de l’Europe ?

La Belgique ne tire que des avantages à faire partie de l'Union européenne, à commencer par la paix. Dans les institutions européennes, les Belges ont leur mot à dire partout, ce qui ne serait pas le cas si l'Union européenne n'existait pas: les grands pays passeraient des accords entre eux que nous n'aurions qu'à respecter. En matière économique, un pays comme le nôtre, qui tire l'essentiel de sa prospérité des exportations, bénéficie considérablement de l'organisation du marché unique: suppression des barrières douanières, harmonisation des normes, liberté de circulation des produits,... Par ailleurs, notre pays tire un avantage substantiel de la localisation à Bruxelles des institutions européennes: les experts évaluent à deux milliards € en moyenne par an le supplément de richesse qui en résulte.

17.
Comment la cour des comptes gère-t-elle les fonds européens ? Ne pensez-vous pas qu’il y ait une discrimination dans la répartition des fonds entre les pays plus riches et les plus pauvres ?

La Cour des Comptes ne gère pas les fonds européens. Les fonds européens sont intégrés dans le budget de l'Union: celui-ci est approuvé conjointement par le Parlement européen et par le Conseil des Ministres. Une fois adopté, le budget est géré par la Commission en suivant les normes du règlement financier. La Cour des comptes ne fait que vérifier, a posteriori, la légalité et la régularité des opérations.
En ce qui concerne l'existence éventuelle d'une discrimination dans la répartition des fonds entre les pays plus riches et les plus pauvres, il faut se méfier d'une approche "Thatchérienne" des choses du genre "I want my money back". Si chaque pays veut recevoir du budget autant d'argent qu'il y a mis, il n'y a plus de solidarité et donc plus de projet commun. Par ailleurs, s'il est relativement facile de calculer ce que chaque pays verse dans la caisse commune, il est beaucoup plus difficile d'évaluer l'ensemble du bénéfice qu'elle retire de l'intégration européenne. La République fédérale d'Allemagne est le pays qui contribue le plus au budget européen, mais c'est aussi le pays qui tire, du fait de la puissance de son industrie, le plus d'avantages de l'organisation du grand marché: les exportations allemandes réalisent des résultats extraordinaires. Par ailleurs, les dix nouveaux pays qui ne recevront pas du budget européen tout ce qu'ils espéraient connaissent aujourd'hui, en moyenne, un taux de croissance de leur P.I.B. qui est supérieur au double de celui des pays de la zone €! Calculer qui est discriminé, dans ces conditions, relève de l'impossible.

18.
Quelles festivités voudriez-vous voir se réaliser lors de la Journée de l’Europe ?

Je voudrais surtout que la Journée de l'Europe soit célébrée par les citoyens, dans tous les Etats membres, et pas seulement à Bruxelles, dans ou aux alentours des institutions européennes. Par ailleurs, je souhaite que cette journée devienne un jour férié dans tous les Etats membres, en plus de la fête nationale propre à chacun. Pour éviter d'allonger inconsidérément la liste de ces jours fériés, je suppose de réexaminer l'opportunité de la célébration de certains événements. Pendant combien de temps encore, estimerons-nous nécessaire de célébrer l'armistice qui a mis fin à la guerre de 1914-1918?

19.
citez 2 personnalités les plus emblématiques de l’Europe ? En quoi ces personnes sont-elles remarquables ?

Il y a beaucoup de personnalités qui mériteraient d'être citées, à commencer par les pères fondateurs, Robert Schuman, Konrad Adenauer, Alcide de Gasperi. Plus récemment, Valéry Giscard d'Estaing mériterait une mention toute spéciale pour l'impulsion qu'il a donnée au projet de Constitution européenne. Si je dois me limiter à deux personnalités encore en vie, je citerais sans hésiter Jacques Delors et Helmut Kohl. Le premier a été, à mes yeux, le plus grand président que la Commission ait eu. Il a eu l'intelligence de réaliser concrètement le grand marché unique et a été l'inspirateur de la politique de cohésion et de solidarité interrégionale. Le second a eu le grand mérite de réunifier l'Allemagne tout en l'ancrant solidement à l'Union européenne par le sacrifice de l'abandon du Deutsche mark.
Aujourd'hui, parmi les personnalités encore en fonction, et pour des raisons totalement différentes, je citerais Jean-Claude Juncker, et Tony Blair, aussi paradoxal que cela puisse paraître pour le deuxième.

20.
De quoi rêvez-vous pour l’Europe ?

Je rêve que les citoyens européens cessent d'avoir peur de l'avenir, de la mondialisation, des autres, et parfois d'eux-mêmes. Qu'ils retrouvent foi en eux et dans leur capacité d'influencer l'histoire du monde. Qu'ils comprennent que l'Europe unie est une vraie chance pour eux et pour le monde.

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  Gérard DEPREZ, Sénateur, Président du MCC. 50 rue de la Vallée, 1000 Bruxelles. Tél: 02/642 29 99 - Fax: 02/642 29 90.